Ostentation sur la commune de Charroux

Sur la commune de Charroux, étape du chemin de Compostelle en provenance de Paris et Tours, on peut admirer les ruines d'une très vieille abbaye dédiée à Saint Sauveur.

L'abbaye de Charroux, fondée en 785 sous Charlemagne par Roger Comte de Limoges et sa femme Euphrasie, reçut des dons considérables en terres, argent et droits de toutes sortes, et de précieuses reliques. Parmi celles-ci, le prépuce de Jésus, recueilli à la circoncision du Christ « conservé pour l'édification des races futures ». Un bulle de Clément VII concédait des indulgences à tous ceux qui assistaient à son ostention tous les sept ans. Les femmes enceintes baisaient la sainte relique pour faciliter leur accouchement et les autres pour les guérir de la stérilité.

charroux ruines abbaye

Caro rubra (la chair rouge du Christ) donna par déformation son nom à la ville de Charroux.

Monseigneur Louis-Edouard Pie, évêque de Poitiers, auquel on doit la proclamation de l'infaillibilité pontificale, se rend à Charroux le 14 juin 1862 pour procéder à l'ostention. Dans son sermon, devant un auditoire en grande partie composé de femmes, il s'efforce de bien préciser aux fidèles la nature de la relique vénérée. « Les habitants de Charroux doivent être heureux et fiers de posséder la vraie chair de notre Seigneur Jésus Christ. Comme le reste du corps est monté au ciel, il ne peut y avoir de confusion... » Puis il prend la peine de donner des détails aussi complets qu'intéressants sur la cérémonie de circoncision. Enfin, il prend une ordonnance confiant la sainte relique aux soins des ursulines de l'abbaye de Charroux, et instituant une adoration exceptionnelle. On comprend tout l'intérêt de cette ordonnance quand on sait que les ursulines ont en charge l'instruction des jeunes filles de la localité.

La cérémonie est particulièrement compliquée : toutes les religieuses sont réunies derrière la supérieure tenant une baguette et sur un signe d'elle toutes font par trois fois une génuflexion devant une paire de rideaux en calicot rouge. De sa baguette la supérieure écarte les rideaux, laissant voir un nouveau rideau de couleur blanche. Après un nouveau coup de baguette et trois nouvelles génuflexions le lever du rideau blanc permet de voir de petits volets en chêne renfermant hermétiquement la châsse. On s'incline encore de plus en plus profondément et après avoir ouvert les volets, on découvre la vitrine de la châsse dans laquelle on aperçoit le médaillon qui renferme le précieux fragment.

(d'après Arm. Machin, Histoire de Saintonge, Poitou page 199)

 À noter qu'il existe une autre commune du même nom dans l'Allier à 10 km au nord de Ganat. Mais le nom vient de quadri vium (quatre chemins) car c'était déjà un carrefour commercial important à l'époque romaine. Le blason de la ville représente un charriot.