Statistiques

Pendant l'année 1772, il est mort sur la paroisse de Notre-Dame de la ville de Nyort, 189 personnes : il y a eu 232 baptêmes, & 74 mariages. Pendant l'année 1771, il y avoit eu 153 morts, 47 mariages, & 230 baptêmes. La population gagne dans cette ville là. (Nous devons cette note & la nouvelle de la mort de M. de Mougon, à M. Bion, Curé de Notre-Dame de Nyort, qui veut bien prendre à nos Feuilles, l'intérêt d'un bon citoyen. Nous espérons que son exemple sera suivi. Nous recevrons avec reconnoissance ses secours & ses conseils.)
AANADPP - n° 4 du 28/1/1773, p. 14


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Epidémie de triplés – Les triplés d'Aizenay

De Palleau, le 13.
Si les accouchements triples étoient heureux, la Province de Poitou seroit bientôt la plus peuplée du Royaume. Voici un troisieme exemple depuis un mois. La femme de Pierre Gloiriau, Tisserand à Aizenay, Bas-Poitou, mariée depuis 6 ans, & n'ayant point encore eu d'enfants, est accouchée de trois enfants mâles, un le Lundi, & deux le lendemain. Le premier a été baptisé à la maison ; & les deux autres à l'Eglise. Ils n'ont vécu tous trois que quelques heures.
AANADPP - n° 4 du 28/1/1773, p. 14
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L'anorexique – suite et triste fin (prévisible)

Nouvelles de la Province
Des Herbiers, le 17.
On ne dissertera plus, & on ne fera plus de plaisanteries à l'occasion de la femme Rigaudeau, du lieu de St Mars-la-Réorthe, qui n'a ni bu, ni mangé, ni dormi depuis 8 mois. Cette femme vient de mourir. A tout prendre, cette abstinence ne devroit pas paroitre plus extraordinaire que l'état d'une fille de Clisson, en Bretagne, âgée de 55 ans, morte en Novembre 1771, qui dormoit 8 ou 15 jours de suite & quelquefois trois semaines sans prendre aucune nourriture, & qui, lorsqu'elle étoit éveillée, restoit souvent 8 ou 15 jours sans pouvoir proférer une parole. On peut mettre encore sur la liste des événements merveilleux, cette fille du Vivarais, qui tous les ans, depuis 30 ans, s'endort précisément le premier Mars, reste immobile dans un état de mort, & ne se réveille que le 19 du même mois, précisément à minuit (Voyez les Etrennes Mignones de l'année 1773.)
Il faut avouer que tous ces faits peuvent servir de Mémoires bien intéressants pour l'Histoire du 18e siecle. Remarquons en passant que les hommes ne sont point sujets à des maladies aussi singulieres. Il seroit peut-être curieux d'examiner pourquoi les femmes ou filles y sont, seules, exposées.
AANADPP - n° 4 du 28/1/1773, p. 14
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Mine d'antimoine

Exploitation d'une Mine d'Antimoine.
On découvrit, il y a quelques années, une mine d'Antimoine, près le Château de la Ramée, paroisse du Boupaire, à une lieue de Pouzauges, en Bas-Poitou. On essaya de l'exploiter ; on en fût bientôt dégoûté par l'abondance des eaux, qui dérangeoient chaque jour les Travailleurs, & parvinrent à les chasser de la mine. On vient de reprendre ce travail, qui a plus de succès. Trente à quarante ouvriers y sont actuellement occupés. Le produit est considérable. On a trouvé le secret de détourner les eaux. Il y a près de cette mine un puits dont l'eau est minérale, & propre, dit-on, à guérir plusieurs maladies chroniques. La découverte de cette mine offre une ressource, puisqu'elle occupe des bras. On fait que l'Antimoine a donné lieu à de grandes contestations 1566, sa nature n'étant pas encore bien connue, un Decret de Médecine, confirmé par l'Arrêt du Parlement, en proscrivit l'usage. Malgré ces ordres, Paumier de Caen, grand Chimiste & habile Médecin, prévoyant le grand avantage qu'on pourroit en tirer en Médecine, osa s'en servir en 1609, & fut dégradé. Ce n'est qu'avec lenteur, & après avoir lutté contre l'espece humaine, qu'on parvient à lui être utile. La vertu de ce minéral fut enfin reconnue, & il fut inséré dans le livre des Médicaments en 1637. L'Antimoine, manié par des mains habiles, est devenu une des bases fondamentales des remedes capitaux. L'Art est parvenu à le maîtriser & à lui faire produire les effets de vomitif, de purgatif, ou de simple altérant. On en fait le kermès minéral, le tartre émétique, le souffre doré d'antimoine, & une multitude d'autres préparations. Il est aussi d'usage dans les Arts : on s'en sert pour purifier l'or & pour polir les verres ardents. Mêlé au cuivre, il rend le son des cloches plus fin ; mêlé en petite quantité avec le plomb, il forme les caractères d'imprimerie : il rend l'étain plus blanc & plus dur. L'émail jaune de la fayance se fait avec de l'antimoine, la suie, le plomb calciné, le sel & le sable. (Voyez le Dict. d'Hist. Nat. Par M. de Valmond.)
AANADPP - n° 4 du 28/1/1773, p. 14

Commentaire : Malgré les apparences, le titre n'a rien d'anticlérical.

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Aurore boréale

PHENOMENE
Le Samedi, 16 de ce mois, vers les 6 heures & demie du soir, environ deux heures après le coucher du soleil, à la suite d'une pluie légère, dont le nuage s'étoit dirigé du nord au sud, & l'athmosphere étant devenue claire et sereine, des Voyageurs qui revenoient de Châtellerault, apperçurent, tout-à-coup, sur leur droite, au nord-ouest de Poiriers (sic), d'où ils étoient alors éloignés d'un peu plus d'une lieue, un Phénomene singulier, qui éclaira leur marche pendant plus d'une heure. C'étoit un très grand nombre de flammes, ou gerbes de feu, en forme de barre ou chevron, élevées perpendiculairement audessus de l'athmosphere, dans la moyenne région de l'air, & conservant entr'elles une distance que l'œil jugeoit être d'environ un pied. Une de ces flammes cependant étoit beaucoup plus éloignée des autres, & pouvoit être regardée comme le chef de la colonne. La couleur de feu de toutes ces flammes étoit, dans le principe, d'un jaune pâle. Elles resterent pendant quelque temps, comme suspendues & immobiles dans leur position. Ensuite la colonne s'ébranla, & dirigea dans le même ordre sa marche vers l'est, puis tout-à-coup, la gerbe qui précédoit toutes les autres s'étant dissipée par un éclair qui brilla extraordinairement, ce fut, si on peut s'exprimer ainsi, comme un signal ; toutes les flammes se réunirent & formerent une seule masse de feu, d'un rouge de sang très vif, qui répandoit au loin la lumiere la plus éclatante, & continua sa marche dans cet état, toujours à la même élévation. Enfin cette masse se déploya peu à peu, & se divisa en deux parties, dont l'une suivit la route de l'est, & l'autre prit celle de l'ouest. Leur lumiere redevint alors d'un pâle clair, de sorte que l'on voyoit très distinctement les étoiles à travers la nuée de feu, qui se portoit vers l'ouest. Les Voyageurs perdirent bientôt le plaisir & le secours de ce spectacle curieux par le retrécissement de l'horizon, borné à gauche par la ville de Poitiers, à droite par les côteaux, qui l'entourent dans cette partie. Les circonstances de ce Phénomene méritoient d'être décrites. Il aura peut-être été apperçu dans d'autres contrées. Il fut aussi remarqué de la ville même, par quelques personnes qui le virent passer sur l'étang de St Hilaire, audessous & au sud-ouest de ses murs. Ce sont sans doute de ces météores-igné, ou feux-follets, qui se voyent dans les lieux d'où s'élevent des parties volatiles-inflammables, tels que les cimetieres, les gibets, les lieux marécageux, & où l'on tire de la tourbe. Ils paroissent plus communément en été & au commencement de l'automne, sur-tout dans les pays chauds. Ces feux-follets, ou feux-électriques, qui quelquefois volent à peu de distance de la terre, & paroissent aller çà & là à l'aventure, sont la terreur des gens de la campagne, qui leur attribuent la malice de chercher à égarer les voyageurs, parce qu'ils fuient ceux qui les poursuivent, & poursuivent ceux qui les fuient : effet tout naturel produit par l'air comprimé,, qui chasse cette flamme légère devant celui qui la poursuit, tandis qu'elle paroit pousuivre celui qui fuit, parce qu'elle se précipite dans le vuide qu'il laisse en fuyant. Lorsqu'on les saisit, on trouve que ces exhalaisons enflammées, ne sont autre chose qu'une matiere lumineuse, glaireuse comme le frai de grenouille, & qui n'est ni brûlante ni chaude. Au surplus, nous n'avons pas vu ce Phénomene ; nous ne le rapportons que d'après le récit d'un Voyageur. Si cette nuée de feu ne se fût pas divisée en deux colonnes, dont l'une suivit la route de l'est, & l'autre prit celle de l'ouest, on pourroit soupçonner que c'est une aurore boréale. Elles paroissent ordinairement du côté du nores, deux ou trois heures après le coucher du soleil. Elles se montrent communément l'hiver ; au lieu que les météores-ignés ou feux-follets ne paroissent guere que dans l'été. Les aurores boréales sont presque toujours fixes dans le même aspect, & éclairent mieux le ciel que le font les météores ordinaires, qui changent souvent de position, que l'on appelle par cette raison « ambulones, & qui sont plus près de la terre. L'aurore boréale est aussi une colonne de feu, qui prend mille couleurs, mille formes différentes, & a différents mouvements. Plusieurs représentent un arc simple ou double. D'autres ressemblent à des drapeaux qu'on feroit voltiger dans l'air, & par les nuances des couleurs dont elles sont teintes, on les prendroit pour de vastes bandes de ces taffetas que nous appellons « flambés ». Quelquefois elles tapissent certains endroits du ciel en écarlate. Lorsque ce Phénomene est dans sa plus grande magnificence, une espece de couronne lumineuse se forme vers le zénith. C'est un beau spectacle pour les Philosophes. Le peuple qui s'effraie de tout, parce qu'il est ignorant, croit y voir des chars enflammés, des armées combattantes & mille autres prodiges. Les aurores boréales sont très communes chez les peuples voisins des pôles ; elles sont pour eux un dédommagement de l'absence du soleil. M. de Maupertuis dit avoir vu dans ce pays, des nuits qui auroient fait oublier l'éclat du plus beau jour. On prétend qu'il n'en a été apperçu fréquemment en Europe que depuis 1716, & très rarement avant cette époque. Les Observateurs étoient sans doute plus rares. On en vit une à Lisbonne, en 1764, qui dura plus de 4 heures. (Voyez le Dict. d'Hist. Natur.)
AANADPP - n° 4 du 28/1/1773, pp. 15-16

Extrait d'une Lettre écrite des environs de Bressuire, le 19.
Nous avons apperçu, ici, samedi 16, vers les neuf heures du soir, un Phénomene extraordinaire. C'étoit comme une nappe de feu qui voltigeoit dans l'air. D'abord elle étoit quarrée, puis elle devint longue, & disparut après avoir éclairé long-temps l'athmosphere. Nous avons eu la nuit du 17 au 18 un ouragan affreux, mêlé de vent & de tonnerre. Il pleut considérablement depuis quelques jours : ce qui nous fait craindre qu'en plusieurs endroits les eaux ne déracinent les bleds, & n'emportent l'engrais des terres. Ce temps, à la suite du peu de gelée que nous avons éprouvé, acheve de rendre les chemins abominables dans notre contrée, où naturellement ils ne sont pas beaux. Voilà une saison bien rigoureuse.
AANADPP - n° 5 du 4/2/1773, p. 19

Commentaire : Le phénomène observé est sans nul doute une aurore boréale. Il est surprenant que le rédacteur ne l'ait pas compris. Il n'a évidemment aucun lien avec la tempête sur Bressuire.
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Naufrage

La nuit du 17 au 18 de ce mois, un grand Bâtiment à 3 mâts, s'est perdu sur la pointe de l'Eguillon, près St Michel-en-l'Herm. On en ignore le nom. Ce Bâtiment est encore droit, & ses mâts debout. On y a envoyé du secours de l'Isle-de-Rhé. …
AANADPP - n° 4 du 28/1/1773, p. 16